jeudi 28 février 2008

Mais où est donc le mont Blanc ?



Un article spécialement rédigé à l'intention d'un ami, pour lequel j'endosse l'habit du "consultant en sommets du massif du Mont-Blanc". La question était la suivante : où se trouve le mont Blanc lorsqu'on a atteint les Posettes ?

L'aiguillette des Posettes (2201 m) domine la vallée de Chamonix depuis son extrémité franco-suisse, non loin de la frontière (col de Balme). Les clichés qui illustrent cette page ont été pris le 20 août 2007 tôt le matin. Ci-contre, l'aiguille Verte (4121 m) et les Drus (à sa droite), au dessus d'un cairn formé de pierres prélevées dans les Ardoisières (où les argentérauds venaient chercher des dalles). Ci-dessous : aux alentours du point culminant de l'aiguillette, garni également de plusieurs cairns et d'une borne géodésique.



Depuis ce joli belvédère, le massif du Mont-Blanc apparaît dans toute sa majesté. La voie d'accès classique au mont Blanc se détache sur l'horizon : aiguille du Goûter (où se situe le refuge homonyme), Dôme du Goûter et, après l'arête dite "des Bosses", le toit de l'Europe (4808 m selon les dernières estimations).
À sa gauche émerge le mont Blanc du Tacul (4248 m).



Juste en dessous, on distingue l'aiguille du Midi (3842 m), dont la particularité est d'être accessible par un téléphérique.



L'aiguille du Midi (3842 m) est reconnaissable à son relais-TV qui la fait ressembler à un clocher d'église et lui confère une silhouette caractéristique.



À votre service !

jeudi 21 février 2008

Le "grand bal" des cascades

Escalader de l'eau ?
Les parapentistes se déplacent "sur" l'air. Mais avez-vous jamais imaginé de pouvoir gravir… de l'eau ?

Si le canyoning permet de descendre des torrents (avec cependant l'aide de cordes), il existe une autre discipline sportive qui permet carrément de gravir de l'eau – oui, vous avez bien lu – en profitant de l'hiver, lorsque la glace fige les cascades. Cette activité, qui emprunte à l'alpinisme ses techniques tout en ajoutant les siennes propres, a quelque chose de surréaliste et de diablement esthétique !

Observez la cascade ci-contre, située à proximité de la frontière franco-suisse, au Châtelard.
Eh bien figurez-vous qu'il est possible de l'escalader, et que l'ambiance est d'une beauté difficile à décrire avec des mots.

D'où cette deuxième photo, prise dans la cascade supérieure…

Ci-dessus : dans la cascade du Pesseux, au Châtelard-Frontière, le 20 janvier 1992. Photo JL Tafforeau, publiée dans le magazine Vertical.

Le grand bal
Durant l'hiver 1991-1992, des conditions exceptionnelles de gel ont été observées dans la région du mont Blanc. À tel point que nombre de cascades, habituellement inaccessibles, ont pu être gravies par les afficionados. J'ai eu la chance inouïe d'être présent à ce moment-là, et d'être conduit dans ces entreprises imposant des précautions pour le moins… techniques par le guide Gilbert Pareau (que l'on voit sur la photo ci-dessus, en train de se frayer un chemin sur les reliefs bleutés de cette cascade. Observez que l'eau trouvait le moyen de couler encore sous la glace).

Des topos renversants
Récemment, l'un des plus grands spécialistes de la glace, François Damilano, a édité deux petits livres en couleurs qui recensent les cascades de la vallée de l'Arve.
Même si vous ne connaissez rien à l'alpinisme, même si l'ascension de cascades de glace vous semble une idée étrange, je vous parie que vous serez fascinés et passionnés en consultant les très nombreuses photographies de ces "topos", comme on les appelle. L'expression "le grand bal" est de F. Damilano, qui, évidemment, a profité de ces hivers d'exception pour réaliser de nombreuses performances dans l'art de la grimpe glaciaire – et qui a poursuivi par la suite ses exploits.

Dry-tooling vs Ancrages secs ?
Les glaciéristes sont même capables de gravir, piolets en mains et crampons aux pieds, des sections rocheuses afin de relier entre eux d'improbables (et instables) stalactites de glace. C'est ce qu'en France nous appelons du "dry-tooling", et qu'un autre grand glaciériste, anglais cette fois, Andy Parkin, désigne comme des "ancrages secs"…

Illustration ci-dessus : couverture du tome 1 des cascades de glace, du mont Blanc au Léman, par Philippe Batoux et Ludovic Seifert, JM éditions 2008. Observez la stalactite auquel est suspendu le grimpeur… et cliquez ici pour en savoir plus, ou là pour télécharger le catalogue (PDF) de l'éditeur.

mercredi 7 novembre 2007

Un Salut à Anterne


Le col d'Anterne (2257 m) marque la jonction entre le massif du Mont-Blanc et le versant de Sixt. Samedi dernier, le 3 novembre, à la faveur d'une météo clémente, j'ai eu la joie d'y saluer symboliquement les nombreuses personnes qui y sont passées, en particulier dans les années cinquante : mes parents, avant même qu'ils ne se connaissent, mon grand-père André Odemard et son vieux copain Gabriel, Guy, le fils de ce dernier, Denise et Pierre… – j'en oublie certainement !


Ceux qui montent depuis le versant de Sixt découvrent le massif du Mont-Blanc au moment où ils atteignent le col. Un panorama d'une beauté stupéfiante, qui achève de couper le souffle des randonneurs !


Un couple de bouquetins est venu répondre à ce salut, d'une démarche tranquille et majestueuse, clin d'œil aimable et délicat des hasards de la nature…


Au loin, l'aiguille Verte et les Drus émergaient derrière les reliefs de la pointe de Pormenaz…

dimanche 21 octobre 2007

Le Peigne : arête des Minettes

Cette ascension de l'arête des Minettes, au Peigne, date du 10 septembre 2005. Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. En voici donc un compte-rendu détaillé.

Aiguille du Peigne, arête des Minettes
L’antédiluvien guide Vallot, dans son édition de 1977, boudait l’arête des Minettes, limitant sa description à une phrase laconique : « l’escalader au mieux avec des passages de IV ». Non sans une vague ironie, il présentait l’itinéraire ainsi : « L’appellation est récente, comme la vogue de cette escalade souvent faite et intéressante. » On pourrait s’en contenter. Après tout, le terrain dit d’aventure est devenu si rare… On peut aussi réparer cet oubli et décrire avec un peu plus de précisions cette escalade agréable, variée et d’une difficulté modérée.


Nicole émerge du dièdre de la 4ème longueur, ravie !

En un sens, l’arête des Minettes est une des premières voies, après les Papillons à avoir été baptisée autrement qu’avec des éléments toponymiques — genre « éperon WNW ». L’appellation « récente » évoquée par le Vallot suggère que le mot minettes fait allusion au sobriquet adressé à l’époque aux jeunes filles, terme désormais ringard, totalement passé de mode ! Aujourd’hui, peut-être l’appellerait-on « arête des meufs » ou « arête des nanas ». Mais foin de machisme alpinistique, il a suffisamment sévi ! Alors va pour les « minettes » et peu importe l’étymologie.


Nicole dans le dièdre de la 5ème longueur.

En août 1943, lorsque Georges Charlet emmena ses deux clients (Alain de Chatellus et Robert Merle d’Aubigné) gravir ces ressauts de granite, il n’avait certainement aucun souci de toponymie. Soyons-lui reconnaissants d’avoir découvert cette petite perle du secteur. L’arête des Minettes est en effet beaucoup moins difficile que son homologue coléoptère, et surtout moins pénible. Une succession de fissures et de dièdres toujours riches en prises, avec un final un peu plus rude si l’on choisit d’aller jusqu’au terme de l’ascension (mais qui doit être contournable par la droite). Le seul défaut qu’on pourrait lui trouver est que le lichen est souvent présent, quoique abondamment « désherbé » par les nombreux passages, au point qu’en rencontrer trop signifie que l’on s’est vraisemblablement égaré.


Sortie du dièdre de la 5ème longueur.

Notes du « monchu »
Pour ma part, j’ai gravi cette voie à quatre reprises, sans jamais suivre exactement le même itinéraire : une première fois en poussant jusqu’au gendarme 3009, mais sans utiliser le passage final athlétique, une deuxième fois en arrêtant les frais dès les premières dalles vertes, une troisième fois comme zakouski à la combinaison Peigne-Carmichaël, et une quatrième, toute récente, en attaquant directement le ressaut principal, pour terminer par les trois rappels évoqués ici. « Monchu de mon état », comme Obélix est livreur de menhirs « de son état », j’ai toujours été conduit dans cette ascension par des guides (*) — ce qui me laissait tout loisir d’observer et de noter le cheminement !
(*) Gilbert Pareau, Christian Dufour et Claude Jaccoux, qu’ils en soient ici remerciés !


Claude dans la dalle au départ de la 5ème longueur.

Difficulté et équipement
Ensemble AD sup., 5b maximum, 4b obligatoire.
Les relais de la voie sont équipés en spits, et il est possible d’établir des relais intermédiaires sur sangles. Quelques pitons dans les longueurs (rarement plus de deux, quelques spits). Le rocher est propice à l’ajout de coinceurs. Rappels équipés en spits.

Approche et attaque
Du Plan de l’Aiguille, prendre le sentier en direction du Peigne, sous la buvette (lacets, quelques équipements) puis remonter la moraine jusqu’au névé du Peigne (plus raide). La sécheresse a fait considérablement maigrir ce pauvre névé qui non seulement peut se révéler glissant (glace vive), mais découvrir des rochers flambant neufs opposant de sérieux obstacles et des « trous » redoutables. Droit au-dessus, les dalles compactes du gendarme Rouge nous dominent (voies « Contamine » et « le maillon manquant » notamment). Gravir ce névé « au mieux » pour rejoindre le démarrage d’une sente qui traverse horizontalement à gauche, passe au-dessus d’un ressaut raide (exposé) en coupant la base de l’arête des Minettes pour donner accès au couloir des Papillons. L’arête homonyme le borde à gauche, tandis que les « Minettes » se situent à droite.
Deux possibilités pour attaquer et atteindre R1 :
a) Soit commencer l’escalade par le premier ressaut, peu marqué, en trois courtes longueurs (petites dalles entrecoupées de passages faciles, 3c et 4a) ;
b) Soit remonter le couloir plus haut, et rejoindre la base du ressaut principal en oblique à droite (passer à gauche d’une lame dressée pointue, 3a).

Escalade
Emprunter des cannelures grises à gauche du fil (3b, spit) puis une fissure rougeâtre orientée à droite (un pas de 4b au départ, puis 3b). R2. Une petite dülfer (3b) suivie d’une traversée sur une petite vire (1 piton) permet de tourner un angle et de descendre dans un dièdre que l’on escalade (4b). R3. Une fissure, suivie d’un nouvel angle à tourner, donne accès à un second dièdre plus facile (3a, sortie en 4b). R4. Escalader des dalles à droite d’un auvent (1 piton au départ, 3b). Du fil, revenir à gauche dans des fissures (un pas de 4b). R5 au-dessus des première dalles vertes. Descendre un petit bloc et traverser les dalles sous le fil de l’arête (facile). R6. Reprendre l’arête à droite (3b), traverser à gauche et surmonter un petit surplomb pour entrer dans un dièdre (2 pitons, Ao ou 5b). R7 sur de nouvelles dalles vertes. Sous un petit gendarme, effectuer une descente en diagonale à gauche, se retourner (1 spit) et gravir à gauche des feuillets (athlétique, 5b). R8 sur les dalles vertes terminales.


Les dalles vertes de la partie finale, dans une ambiance mystérieuse…


La traversée complexe (et facultative) de la 8ème longueur.

Descente
Il est possible de descendre depuis les premières dalles vertes (R6) par une désescalade (exposé) puis un rappel installé au-dessus d’une écaille.
Depuis le terminus de l’arête (R8 dans notre description), effectuer un premier rappel direct depuis un ancrage bien visible quelques mètres sous le relais, traverser un couloir pour découvrir le deuxième ancrage caché derrière une arête. Le deuxième rappel est partiellement en fil d’araignée. Le troisième rappel est plus aisé. Descendre ensuite en désescalade le couloir (nombreuses pierres instables) jusqu’à l’attaque.
On peut aussi poursuivre l’ascension jusqu’au gendarme 3009 par un couloir à droite de la partie terminale de l’arête (non équipé, 2b à 3b) et, de là, continuer jusqu’au Peigne, voire au-delà jusqu’à l’aiguille des Pèlerins par la voie Carmichaël…

vendredi 19 octobre 2007

Enfin : les topos des Drus

Enfin !!
Les topos précis et exacts de toutes les versions successives du pilier Bonatti aux Drus, passées, présentes et même… à venir !
Allez vite voir à ce lien (en espérant qu'il drue, pardon, qu'il dure) et bravo à son auteur, Charles Thiébault !