mardi 19 juillet 2016

Les Chéserys, voie Rouge

Était-ce la chaleur ? L’approche des coureurs du Tour de France ? L’angoisse du gardien de but de l’Euro ? Le “monchu” a refusé la suggestion initiale de son guide – rébellion ? – et préféré retourner aux Chéserys, où il a pourtant déjà gravi moult itinéraires. Collectionnite ? Ce pourrait être un début d’explication. Mais quand on aime, on ne compte pas… sauf l'auteur de ses lignes, qui totaliserait donc 8 voies aux Chéserys, soit de gauche à droite : Aubade, Blanche (avec variante David et William Ravanel), voie de l'EMHM, Blonde, Jaune, Rousse, Greg-Buffat… et donc cette Rouge.

Sortie du passage délicat de la longueur 1. À droite du casque, on devine le sac à dos déposé à l'attaque.

Il s’agissait de « se remettre sur les pieds »… sauf que le pas d’attaque est un rétablissement sur les mains. Ensuite, tout rentre dans l’ordre du monde des dalles, avec une succession de longueurs dont chacune comporte un passage technique, bref mais sérieux, entre le 4c et le 5b. Le passage le plus amusant est la fissure au-dessus de la deuxième terrasse, inattendue aux Chéserys.

Vue plongeante depuis le relais final : le “monchu” au bout de la corde de 60 mètres.

Une corde absolument neuve, deux brins de soixante mètres, l’un bleu, l’autre vert, allaient m’assurer tout du long de cette voie, maniée par Zian avec le soin et l’adresse du pro. De quoi “enchaîner”, comme on dit, de belles envolées. Une vingtaine de mètres pour commencer – faut se réacclimater – puis deux longues séquences de soixante mètres chacune. Voilà qui permet de s’employer, tout en s’économisant pour tenir la distance.

 Arrivée au dernier relais, deux images extraites d'une vidéo.

Que de beaux mouvements dans ces 150 mètres ! Si certains passages nécessitent un examen soigneux du rocher, ils sont toujours gratifiants, variés, pas toujours “en dalle” contrairement à ce que le secteur laisse entendre. Lors d’un rappel, nous avons reçu la visite d’un chamois, évoluant dans le secteur de la voie “La Rousse” avec une aisance qui donne envie de se réincarner dans la peau d’un tel animal, ah ouiche !

Ce chamois musarde dans les dalles, à proximité immédiate de la voie “La Rousse”, dont on distingue le “mini-surplomb” sur la droite.

De vrais moments de bonheur, tout simple, sous les doigts et les pieds, grâce encore à Zian, qui a veillé sur moi avec “coolitude” et adresse tout au long de cette chaude demi-journée. La corde bleue, lors de son tout premier rappel, a tenu à affirmer son caractère, sans pour autant désarçonner son propriétaire : il faut juste savoir “parler à ses cordes”, non mais !

Le second de cordée au dernier relais. Il faut, encore une fois, remercier Zian pour avoir “assuré” non seulement la conduite de la cordée, mais aussi pour ses prestations de photographe et vidéaste de l'ascension.

La voie Rouge figure parmi les itinéraires historiques de la falaise, ouverts à partir de 1969 par les guides d’Argentière, et baptisés de noms de couleurs : voies blanche, bleue, noire, jaune et rouge – en attendant que d’espiègles ouvreurs du nouveau millénaire ne leur adjoignent une “brune”, une “blonde” et une “rousse”, ces deux dernières ayant vu passer les chaussons de l’auteur de ces lignes et de son guide, Zian.

Topo :
Beaucoup d'efforts ont été déployés pour reconstituer le déroulement de l'escalade, y compris en repérant l'heure sur les clichés, ou en comparant avec d'autres topos, comme ceux d'Hervé Thivierge, de Michel Piola, des guides Olizane, Vamos ou de Dulac et Perroux. Comme toujours, il mérite vérifications et validations : n'hésitez pas à commenter cet article de blog si vous avez des précisions.

La voie démarre au pied d’un petit éperon arrondi de couleur verte. Si on descend encore un peu et qu’on le contourne, on tombe sur le départ de “La Rousse”. À gauche, dans une dalle surmontée de surplombs monumentaux, on devine les gollots d’anciennes variantes probablement devenues dangereuses en raison de la vétusté du matériel (signalées par Dulac et Perroux en 2001 dans leur topo).
Le départ exige un rétablissement (5a) pour se placer dans l’axe de dalles arrondies (4b) terminées par un ressaut plus raide un tantinet technique (5b). La longueur suivante est plus relax (4b, 3b) et conduit sur une confortable vire, au pied d’une vraie fissure à feuillets négociable par des coincements de mains et opposition des pieds (4c), suivie d’un pas de 4c dans un petit mur, jusqu’à une terrasse spacieuse. Au-dessus, un ressaut se franchit par une fissure (4c) ou une dalle sur sa droite (5b, délicat). La petite longueur qui suit se termine par une sorte de mini-dülfer (4c). Ultime et courte longueur, plus facile, bombement en petit 4 et dalles couchées en 3. On doit pouvoir poursuivre au-dessus dans du terrain facile. Descente en rappels plus ou moins nombreux selon les cordes employées et la compétence de celui qui les pose. Zian en a installé deux, qui nous ont ramenés au sol, largement à gauche de l’attaque.